Dans un stand-up d'une heure, le jeune humoriste Loïc Fontaine dévoile sans aucun tabou sa vision de la société actuelle avec les yeux d'un trentenaire apparemment désabusé. Sa posture un brin clownesque invite à lire entre ses lignes et à découvrir ses réels engagements.
Un texte apparemment « atrocement provocant » qui dessine une histoire originale, attachante et inattendue
Il est très difficile de se démarquer et de durer dans la faune d'humoristes qui dépeignent à tout va les petits tracas quotidiens. Il faut pouvoir raconter une histoire, qu'elle s'adapte au ressenti du public tout en étant unique. Le comique doit trouver sa patte. Loïc Fontaine, passé par le journalisme télé - actu, politique, société - et depuis toujours apprenti-comédien, est en train de construire son univers bien à lui. Entre confidences personnelles quasi-pathétiques (construisant son image de clown attendrissant) - « mes yeux, ça va, ma bouche, ça va, mon nez, ça va, mais c'est une fois assemblés que ça va plus. » - et réflexions abruptes puis carrément poétiques sur la vie en société, le racisme, le terrorisme et les religions, tout y passe, sans filtre, comme il était promis. Et pourtant, il reste de ce phrasé 100% choc un zeste de tendresse, de recherche d'imaginaire, d'exploration d'un autre monde - le passage sur les Esquimaux est très bien amené. Loïc Fontaine joue aisément avec les clichés, titille avec appétit la bien-pensance (ses sourcils se lèvent ou se baissent en fonction) et s'amuse à semer son public dans des histoires à rallonge qui piquent à la toute fin. En une heure de spectacle, on ressort avec une vision autre du monde qui nous entoure, certes peut-être pas celle qu'on voudrait, mais qui éclaire sur tous les plans et qui, sans imposer, propose une voie : celle du questionnement permanent. Et ça, on aime très fortement.
Un comédien de stand up à l'écoute de son public et au vrai talent comique, entre le rire et les larmes
Habillé simplement d'un jean et d'une veste en cuir, l'humoriste se tient debout pour enchaîner ses sketchs. Après avoir longtemps décrit son physique de « laideron », il enchaîne sur ses difficultés à séduire et plus si affinités. Mais personne n'est dupe : son air de ne pas y toucher - gros yeux interloqués, moue dégoutée - rend la situation encore plus hilarante. Car Loïc Fontaine a une « gueule » qui l'avantage : ses punchlines toutes plus implacables et trash les unes que les autres prennent un tour presque tendre. Allez savoir pourquoi mais c'est sûrement car le comédien a de la présence et qu'il sait s'en servir. Cette apparence de mime aux mimiques amplifiées est du meilleur effet. On attend la suite des aventures et des réflexions turlupinantes (spoiler*) de Monsieur Fontaine avec impatience.
Claire BONNOT