Dans une adaptation moderne de la grande pièce de théâtre, la compagnie des Moutons Noirs manque son envoi et ne touche définitivement pas. La faute à trop de registres de jeu superposés brouillant jusqu’à l’émotion des vers sublimes de Rostand. C’est bien dommage, les comédiens ont tant de panache…
Histoire de famille bouleversante s’inscrivant dans la grande Histoire, “La Grande Musique” touche à un endroit universel : ce qui fait l’identité de chacun, somme d’un passé souvent inconnu ou secret. Le texte, l’interprétation et la mise en scène sont au diapason. Une pièce magnifique !
Fidèle à ses mises en scène-témoignages frontales et bouleversantes, Emmanuel Meirieu livre, aux travers de parcours individuels tirés du roman de Svetlana Alexievitch, la détresse de tout un peuple traumatisé par le régime soviétique tout autant que par sa chute. Une parole livrée avec une humanité déchirante et qui raconte, bien au-delà des frontières de l’URSS, le désenchantement de l’humanité toute entière. Saisissant !
Dans une pièce poignante et nécessaire, Christine Citti fait entendre les voix des jeunes oubliés de la société qui n’ont parfois que le choix de devenir des « chiens enragés ». Passe entre les filets de cette parole brute un flot infini de tendresse chargé d’espoir.
Dans un huis clos psychologique glaçant, adapté de la pièce britannique “After The End”, le jeune metteur en scène Antonin Chalon orchestre, avec une précision implacable, un pas de deux d’une acuité terrible entre un homme et une femme. Magistral !
Bâtisseur d’une famille de théâtre qu’il s’est choisie pour ce projet d’envergure, Pascal Rambert sonde les fondations de l’humanité, dans l’intimité d’un clan et l'universalité d’une société, via l’infinie puissance de (dé)construction du langage. Un hommage enfiévré au théâtre et à ses comédiens qui n’est pas sans rappeler La Mouette de Tchekhov.
Brouillant les pistes entre fiction et réalité en alternant théâtre et cinéma, Cyril Teste adapte avec une grande esthétique le scénario du film de John Cassavetes. En plein dans son rôle et sa réalité, Isabelle Adjani y est particulièrement émouvante même si le spectacle souffre d’un certain manque de profondeur.
Après avoir livré l’horreur sur le plateau de la Comédie-Française avec le saisissant spectacle Les Damnés, le metteur en scène Ivo Van Hove y déchaîne la vengeance avec une tragédie grecque on ne peut plus intemporelle. Force et subtilité se dégagent de cette pièce qui remue corps et âme.
Via un processus théâtral sériel incroyable, le jeune dramaturge australien Simon Stone donne à voir les rouages oppressifs de la société patriarcale sur les femmes. Une expérience impressionnante mais bien plus saisissante sur la forme que sur le fond.
Véritable odyssée moderne inspirée de L’Énéide, « J’ai pris mon père sur mes épaules » de Fabrice Melquiot, mis en scène par Arnaud Meunier, est un spectacle intéressant et émouvant mais qui perd le spectateur en s’engageant sur trop de thèmes. Il aurait gagné en intensité en s’allégeant de quelques scènes.
Sélection des belles pièces à voir à Paris (et depuis votre ordinateur pour La Fuite de Macha Makeïeff) pendant la période des fêtes de Noël 2018.
Ambitieux, dense, explosif, le spectacle Joueurs, Mao II, Les Noms, adapté de trois romans de l’écrivain américain Don DeLillo, poursuit la quête réflexive de son jeune metteur en scène Julien Gosselin : sur le pouvoir de la littérature et la fabrication de la violence dans les sociétés humaines. Une épopée fascinante d’un peu plus de 9 heures sur les ressorts de notre monde actuel, dynamitée par une mise en scène ultra-moderne, entre théâtre, cinéma et concert électro.
Ce spectacle profondément bouleversant en forme de biopic théâtral se vit comme une vibrante ode à la différence. La Machine de Turing écrite par Benoit Solès, qui en interprète aussi le rôle-titre, Alan Turing, décrypteur de la machine de guerre nazie “Enigma”, est ce que le théâtre populaire fait de mieux : du théâtre exigeant, divertissant, émouvant et impactant. Un rendez-vous culturel dont on sort… différent !
Après avoir fait l’ouverture (et l’événement) du Festival d’Avignon cet été dans la mythique Cour d’honneur du palais des Papes, Thomas Jolly livre son Thyeste sur la scène parisienne. Une histoire de vengeance fratricide innommable au sein d’une famille royale antique ou l’occasion de questionner les noirceurs éternelles de l’Humanité. Fascinant !
Dans une mise en scène très cinématographique signée Ladislas Chollat, la pièce dramatique de Florian Zeller, Le Fils, opte pour un ton très juste sur le mal-être existentiel d'un adolescent avant de sombrer dans trop de pathos. Malheureux car la confrontation père-fils - âge adulte/enfant - est d'une grande justesse.
Dans un décor sépulcral écrasant du collaborateur de Patrice Chéreau, Richard Peduzzi, la « tragédie enfantine » de Wedekind qui avait choqué en 1891, peine à émouvoir et à faire ressentir les affres de l'adolescence dans la mise en scène glaciale du pourtant génial Clément Hervieu-Léger.
Dans une sorte de huis clos forcé par les évènements terribles qui viennent de se jouer, un homme et une femme, amants, songent à l'impensable. Au lendemain des attentats du 11 septembre 2001, ce couple illégitime qui a réchappé à la catastrophe se laisse tenter par la possibilité de disparaître du paysage pour refaire sa vie. Un texte ciselé au cordeau qui laisse sans voix du début à la fin (et quelle fin !) porté par des acteurs insaisissables et formidables.
Dans une mise en scène remarquablement cinématographique, la cinéaste Claire Devers s'attaque pour la première fois à la scène avec « Bluebird », une pièce tragique et rédemptrice du dramaturge britannique Simon Stephens. Malgré la beauté qui se dégage de cet ensemble et la justesse bouleversante de Philippe Torreton, l'histoire piétine et peine à émouvoir, probablement trop engoncée dans une mise en scène millimétrée.
Superbe meneur de troupe et maître dans l'art du théâtre choral, Clément Hervieu-Léger offre une version bouleversante de la dernière pièce autobiographique de Jean-Luc Lagarce, écrite quelques semaines avant sa mort. En adaptant avec sensibilité cette histoire d'un jeune homme qui vient annoncer sa mort prochaine à sa famille qu'il n'a pas vue depuis vingt ans, le pensionnaire de la Comédie-Française nous offre un voyage troublant au cœur de notre propre histoire personnelle. L'essence du théâtre même.
Dans une mise en scène maîtrisée au millimètre près, un homme raconte son calvaire de femme amoureuse, mariée et mère de famille qui l’amènera à commettre l’irréparable. Une confession intime et terrifiante à la lueur - glauque – d’une vie apparemment rangée.
Pour sa première mise en scène au théâtre, l'actrice et réalisatrice Mélanie Laurent a choisi l'adaptation d'un roman de James Frey, Le Dernier testament de Ben Zion Avrohom, racontant les actions d'un Messie du XXIème siècle. Malgré une scénographie superbe, des acteurs au diapason et des questionnements excitants, le mystère tant attendu ne vient pas, faute peut-être à ce texte qui ne semble pas avoir trouvé la clé de l'existence et de l'amour entre les hommes.
Dans un stand-up d'une heure, le jeune humoriste Loïc Fontaine dévoile sans aucun tabou sa vision de la société actuelle avec les yeux d'un trentenaire apparemment désabusé. Sa posture un brin clownesque invite à lire entre ses lignes et à découvrir ses réels engagements.
La Comédie-Française nous invite avec une grande élégance dans le monde de la nuit, celui interlope des cabarets transformistes des années folles. Du rire aux larmes, ces « clowns tristes » qui ne sortent que la nuit ont le courage du désespoir et de l'espoir. Sublime.
Au travers d'un opéra-théâtre chanté et parlé signé Benjamin Lazar, Florent Hubert et Judith Chemla, la « Traviata » de Verdi, inspirée de « La Dame aux Camélias » de Alexandre Dumas fils, ressuscite sur la scène des Bouffes du Nord, avec une proximité rare aux grandes héroïnes lyriques et littéraires. Un envoûtement des sens incroyable et une impression inoubliable.
Au beau milieu d'une chapelle dans le Théâtre des Halles, un jeune homme normal va vivre une aventure monstrueusement grotesque et liée à... ses fesses. Un texte de Pierre Notte et une interprétation de Brice Hillairet, d'une force initiatique incroyable.
Dans un impressionnant dispositif scénique, la metteuse en scène Séverine Chavrier adapte l'univers brûlant du grand écrivain américain William Faulkner.
Thomas Ostermeier fait voler sur l'Odéon une "Mouette" entre deux eaux, celles de la trivialité de nos existences et des beautés de l'espérance, sans parvenir à convoquer le rêve - même impossible - que l'on attendait d'un Tchekhov.
Dans une mise en scène minimaliste et moderne, Stéphane Braunschweig porte aux nues l'alexandrin racinien mais statufie quelque peu les grands personnages tragédiens. Les acteurs du Français leur redonnent toute leur vitalité.
Le film se révèle bien plus fidèle à Poquelin qu'on ne pourrait le croire, pourtant noyé dans une ambiance contemporaine de gosses de riches dépravés et fortement désœuvrés.
Créée en 2020, cette pièce du maestro Jean Bellorini revisitant le mythe d’Orphée est une partition poétique, langagière et musicale d’une grande beauté mais d’une certaine complexité. La musique céleste de Monteverdi, la scénographie époustouflante et le jeu excentrique des comédiens rappellent que la vie s’allume en un éclair.